Liées à un imaginaire puissant, les araignées font parfois peur… Mais quelles sont leurs fonctions dans les écosystèmes ? Micro & Macro font le point !
1 – Micro-bio : Qui sont les araignées ?
2 – Au Microscope : Morphologie et cycle de vie des araignées
3 – Biocénose : Place des araignées dans le réseau trophique
4 – Macrorama : Fonctions écologiques des araignées
5 – Envie d’agir ? Favoriser la présence des araignées
Qui sont les araignées ?
Les araignées appartiennent à l’embranchement des arthropodes (du grec « arthron « , « articulation » et « podos », « pieds ») et représentent à elles seules plus de la moitié des Arachnides, classe à laquelle ont prêté leur nom. Elles y forment l’ordre des Aranéides.
Au total, on recense aujourd’hui environ 40 000 espèces d’araignées réparties en une centaine de famille, dont environ 7 000 espèces en Europe et près de 1 700 en France ! Mais on est loin d’en avoir recensé la totalité : actuellement, près de 50 nouvelles espèces sont décrites chaque année en Europe et sur le pourtour méditerranéen !
Les araignées se sont adaptées à presque tous les habitats, y compris les milieux aquatiques. La majorité d’entre elles passent une ou plusieurs phases de leur vie en milieu terrestre, en occupant toutes les strates du sol au sommet des arbres, de la végétation herbacée et buissonnante aux grottes et réseaux interstitiels (très petits espaces présents dans le sol, les troncs d’arbres, les pierres etc.) !
Elles peuvent être présentes en très grand nombre dans les milieux propices, comme les prairies, où on compte jusqu’à plus de 1 000 individus au mètre carré. Cependant, on ne recense qu’entre 20 et 120 individus au mètre carré dans les systèmes modifiés par l’être humain (« systèmes anthropisés »).
Histoire des araignées
L’apparition des araignées est située entre le Carbonifère (-360 à -300 millions d’années) et le Trias (-250 à -200 millions d’années).
Les plus anciens représentants connus possèdent déjà de grandes similitudes avec certaines espèces d’araignées actuelles, notamment celles qui tissent les toiles en forme de cercle ou d’anneau (les toiles orbiculaires). Elles ont donc eu peu besoin d’évoluer pour rester adaptées à leur environnement !
Morphologie des araignées
D’une taille comprise entre quelques millimètres et une dizaine de centimètres, elles possèdent 3 ou 4 paires d’yeux (certaines en étant dépourvues), disposées différemment selon les espèces. Leur corps est recouvert d’une cuticule (couche superficielle résistante et imperméable) qui fait office d’exosquelette et est divisé en 2 parties principales : la partie avant, le céphalothorax (tête et corps soudés ensemble) ou « prosome », et la partie arrière, l’abdomen ou « opisthosome ».
Le céphalothorax porte 4 paires de pattes ambulatoires ainsi qu’une paire de pédipalpes, utilisée dans de nombreuses activités comme la chasse (capture et ingestion des proies) ou la reproduction (parade nuptiale notamment). Enfin, le dernier appendice porté par le céphalothorax est la paire de chélicères : sorte de “cornes-pinces”, situées près de la bouche et reliées aux glandes à venin, elle leur sert à broyer ou aspirer leur proie liquéfiée, transporter leur repas ou le cocon protégeant les œufs, creuser un terrier, etc. Le céphalothorax est reliée à l’abdomen par une tige étroite, membraneuse et flexible, appelée « pédicule » ou « pédicelle ».
L’abdomen porte les parties génitales et les filières (organes servant à filer la soie), et présente généralement une grande variété de couleurs et de motifs selon les espèces (teintes sombres, teintes claires, couleurs vives…). Certaines espèces sont même capables d’adopter la couleur du substrat sur lequel elles se trouvent (on appelle ce phénomène l’homochromie adaptative) !
La classification la plus récente sépare les araignées en trois grands groupes :
Les Aranéomorphes
Ce groupe est constitué de la très grande majorité des familles d’araignées (un peu plus de 90% !). Araignées sauteuses, veuves noires, tarentules vraies, toutes sont des aranéomorphes ! Leur abdomen n’est pas segmenté et les filières (généralement 6 paires) se situent au bout de ce dernier. Leurs chélicères sont dirigés vers le bas, perpendiculaires à l’axe du corps et munis de crochets qui se croisent diagonalement (comme des pinces).
Les Mygalomorphes
Comme leur nom l’indique, ce groupe est constitué de ce qu’on nomme communément les mygales. Au corps plus massif que les araignées des deux autres groupes, elles possèdent un abdomen non-segmenté, à l’extrémité duquel se situent les filières, au nombre généralement réduit à 2 paires. Leur chélicères sont dirigés vers l’avant et se replient en parallèle au repos.
Les Mésothèles
Aussi appelées “araignées primitives”, ce groupe n’est aujourd’hui composé que d’une seule famille, les Liphistiidae. Contrairement aux autres araignées, elles possèdent un abdomen segmenté et leurs filières, généralement quatre paires, sont situées au milieu de l’abdomen.
Cycle de vie des araignées : la nutrition
La plupart des araignées sont des carnivores généralistes et opportunistes (se nourrissant des proies qu’elles trouvent à leur portée au moment où elles chassent). Quelques rares espèces sont spécialisées, notamment les espèces myrmécophages (qui se nourrissent exclusivement de fourmis) ou cannibales (qui se nourrissent d’autres araignées). Pollen, nectar et spores de champignons font aussi partie de l’alimentation de certaines araignées !
Les araignées prédatrices chassent (de jour comme de nuit selon les espèces) à l’aide de pièges (toiles), directement au sol ou sur la végétation, avec ou sans embuscade, en poursuivant leurs proies ou non, et en leur injectant systématiquement du venin (pour les espèces qui en produisent). Leurs proies sont généralement consommées directement mais certaines espèces les stockent en vue d’une consommation ultérieure.
Comme toutes les arachnides, les araignées n’absorbent que des liquides et ont à ce titre développé un mode de nutrition complètement adapté : la digestion extracorporelle. Elles injectent un liquide digestif directement dans le corps de leur proie ou le déversent sur elle, puis aspirent les tissus liquéfiés ou broient son corps en bouillie.
En conditions défavorables, elles sont capables de jeûner plusieurs mois, voire près d’une année, ce qui leur assure de meilleures chances de survie en cas de modification brutale de leur environnement !
Cycle de vie des araignées : la reproduction et le développement
Les araignées ont une reproduction sexuée (s’opérant entre un individu mâle et un individu femelle). Elles se reproduisent à tout moment de l’année sauf durant l’hiver.
Si la femelle est réceptive à la parade nuptiale et accepte l’accouplement, le mâle dépose le liquide reproducteur sur l’organe sexuel de la femelle grâce à des pédipalpes spéciaux, terminés par un organe copulateur en forme de bulbe. La femelle pond ensuite ses œufs dans un cocon protecteur, qu’elle peut cacher (dans la végétation, dans une loge de soie conçue à cet effet, etc.) ou transporter (attaché à ses filières ou porté par les chélicères) jusqu’à l’éclosion. Les juvéniles sont généralement autonomes dès la naissance, avec une courte phase grégaire (regroupement en une communauté plus ou moins organisée) avant leur dispersion.
La croissance se fait par mues successives jusqu’à ce que la taille adulte soit atteinte (seules certaines mygales muent encore après maturité). Leur nombre varie selon les espèces mais généralement, plus l’individu adulte est grand, plus le nombre de mues est important.
Place des araignées dans le réseau trophique

Fonctions écologiques des araignées
Des organismes régulateurs
Par la chasse qu’elles pratiquent, les araignées exercent une pression sur la population d’insectes, notamment durant leurs premiers stades de développement. Elles participent également, dans une certaine mesure, à la régulation de la population d’autres arthropodes. En revanche, leur présence au sein d’un écosystème n’a que peu d’effet sur les populations de pollinisateurs (abeilles, bourdons, papillons etc.) : leur aptitude au vol et leur vision développée leur permettent d’éviter les toiles dans la plupart des cas.
Une source de nourriture appréciée d’autres espèces
Les araignées possèdent de nombreux prédateurs : leur présence participe donc à les attirer et les maintenir dans les écosystèmes. Ces prédateurs, qui ne consomment pas qu’exclusivement des araignées, participent également à la régulation d’autres espèces.
Favoriser la présence des araignées
Bien qu’elles soient présentes dans de nombreux milieux et qu’elles fassent preuve d’une grande résistance face aux bouleversements ou milieux extrêmes, certaines pratiques favorisent leur présence :
- Favoriser la diversité d’habitats : en mettant à disposition de nombreux habitats différents (pierres, bois, herbacées, arbres, haies, trognes, etc.), la colonisation de milieux différents et la diversification des espèces sont facilitées, limitant ainsi la concurrence et favorisant la reproduction et la dispersion.
- Couvrir son sol : la couverture de sol leur procure abri et nourriture, protection contre les prédateurs et l’hiver, mais elle leur servira aussi de garde-manger !
- Favoriser la présence de couloirs biologiques : nombre d’espèces d’araignées chassent, se reproduisent et/ou se dispersent dans la végétation basse. Les bandes enherbées ou les couverts vivants pourront par exemple leur servir de biocorridors.
- Ne pas utiliser de pesticides : qu’ils soient de synthèses ou d’origine naturelle, ils privent les araignées de toute une partie de leur alimentation.
- Limiter le travail du sol dans les régions à mygalomorphes : les mygalomorphes creusant leurs terriers à même le sol, celles-ci sont particulièrement sensibles aux perturbations.
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