Les Dossiers de Micro & Macro – Les Collemboles du sol

Micro & Macro se penchent sur les collemboles du sol, ces étranges animaux aux formes multiples, indispensables à la décomposition des résidus végétaux !

1 – Micro-bio : Définition et histoire des collemboles du sol

2 – Au Microscope : Morphologie et cycle de vie des collemboles du sol

3 – Biocénose : Place des collemboles du sol dans le réseau trophique

4 – Macrorama : Fonctions écologiques des collemboles du sol

5 – Envie d’agir : Favoriser la présence des collemboles du sol

6 – Bibliographie

7 – Pour citer ce document

 

 

Qui sont les collemboles du sol ?

Les collemboles appartiennent à l’embranchement des Arthropodes (animaux au corps segmenté avec exosquelette) et au sous-embranchement des Hexapodes (arthropodes à 6 pattes : du grec ancien hèx, « six » et pous, « pied »), au sein duquel ils forment la classe Collembola.

Avec près de 8000 espèces connues dans le monde et plus de 2000 en Europe, les collemboles sont présents des forêts tropicales humides jusqu’aux limites des glaces polaires (on parle alors d’espèces ubiquistes). Ils représentent, avec les acariens, la grande majorité de la mésofaune du sol. La plupart des collemboles craignent la lumière et ont besoin d’humidité : c’est pourquoi ils vivent généralement dans les premiers centimètres du sol. Cependant, certaines espèces vivent au-dessus du sol : leur présence est alors dépendante du rythme des saisons.

Pour les découvrir à l’oeuvre, on vous conseille la magnifique vidéo « Planète Collemboles, la vie secrète des sols » de Philippe Lebeaux et Jérôme Cortet : https://vimeo.com/147126953

 

Histoire des collemboles du sol

 

Collemboles du sol Objet6Les plus anciens fossiles connus de collemboles confirment qu’ils existent au moins depuis la période du Dévonien (il y a 380 millions d’années), soit avant l’apparition des insectes et 130 millions d’années avant l’apparition des dinosaures ! De plus, certains spécimens fossilisés il y a 33 millions d’années ont été assimilés à des genres et des espèces encore présents aujourd’hui. On a d’ailleurs longtemps considéré les collemboles comme des insectes primitifs. La classification phylogénétique (basée sur l’ADN) les rapproche cependant plutôt des crustacés comme le cloporte.

 

 

AuMicroscopeDMMP

Morphologies des collemboles du sol

Collemboles du sol Objet1

Suivant les espèces, les collemboles présentent une étonnante diversité morphologique. De petite taille (en moyenne 2 à 3 mm), les plus petites espèces mesurent 0.25 mm et les plus grandes, jusqu’à 9 mm ! De forme allongée ou sphérique, ils sont généralement de couleur gris foncé, bleutée, blanchâtre ou jaunâtre, mais portent parfois des couleurs beaucoup plus vives (rose, orange, rouge, etc.) ! Comme pour les lombrics, les espèces dépigmentées vivent généralement dans les horizons plus profonds du sol. Les collemboles possèdent une paire d’antennes segmentées en 4 à 6 segments. Comparés aux insectes, ils ne possèdent ni ailes, ni yeux composés, bien qu’ils puissent avoir jusqu’à 8 yeux simples !

Collemboles du sol Objet2

Les collemboles possèdent également deux organes qui leur sont propres et situés sous l’abdomen :

  • Le tube ventral ou collophore : cet organe peut être comparé à un siphon ou une ventouse qui sert à réguler les échanges hydriques avec l’environnement. Il permet aux collemboles de s’hydrater et participe à leur respiration.
  • La furcula ou furca : il s’agit d’une fourche à 2 dents repliée sous l’abdomen qui permet aux collemboles de sauter en cas d’urgence de plusieurs centimètres en quelques millisecondes, un saut d’une hauteur atteignant de 50 à 100 fois la longueur de leur corps ! Cet organe, bien que très fréquent, n’est pas systématique et certaines espèces n’en possèdent pas (on les a regroupées dans l’ordre des Poduromorphes).

 

Cycle de vie des collemboles du sol : la nutrition

Collemboles du sol Objet5Selon les espèces, les collemboles ont un régime alimentaire varié ou bien, au contraire, très strict. Certaines espèces sont également capable d’adapter leur alimentation aux ressources immédiatement disponibles : on dit qu’elles sont opportunistes. Cependant, une majorité des espèces connues se nourrissent essentiellement de végétaux en décomposition et des micro-organismes de la litière (bactéries, pollens, micro-algues, hyphes et spores champignons). De façon générale, les champignons et, dans une certaine mesure les bactéries, font partie du régime préférentiel des collemboles.

Toutefois, les espèces vivant dans des habitats extrêmes et celles vivant dans la litière mais manquant de nourriture pendant l’hiver peuvent se tourner vers les lichens et les mousses. D’autres espèces, enfin, sont phytophages et se nourrissent de feuillages de végétaux ou racines vivants, ou encore carnivores et consomment des nématodes, des protozoaires et des rotifères (micro-organismes vivant dans l’eau douce ou salée et en milieux humides).

Cycle de vie des collemboles du sol : la reproduction

Collemboles du sol Objet3Le cycle vital des collemboles est généralement court, certains pouvant se reproduire trois semaines après leur naissance. La reproduction sexuée directe est plutôt rare : ils utilisent majoritairement la parthénogenèse pour se multiplier (une femelle pond un oeuf non fécondé qui donnera une femelle).

Collemboles du sol Objet4Le plus souvent, la reproduction sexuée se fait indirectement : le mâle dépose un spermatophore (capsule contenant les spermatozoïdes) à proximité de sa partenaire puis la guide vers celui-ci afin qu’elle puisse s’y frotter et ses œufs être fécondés.

 

 

Place des collemboles du sol dans le réseau trophique

CollembolesObjet7B

 

 

Fonctions écologiques des collemboles du sol

 

Des décomposeurs hors pairs

Tout comme son cousin le cloporte, le collembole découpe en petits morceaux les résidus végétaux (feuilles, paillis, etc…) rendant ces derniers mieux assimilables pour les champignons qui vont se charger de digérer la lignine (partie carbonée et dure des plantes). Étant formellement un « décomposeur », il est en amont du travail des animaux fouisseurs comme les lombrics et les enchytréides.

Des régulateurs des populations de champignons et de micro-organismes

Parce qu’ils consomment les champignons saprophytes (se nourrissent de matières organiques en décomposition) et parfois certains champignons mycorhiziens, les collemboles régulent ainsi la croissance de leurs populations. 

Tout comme les nématodes, les collemboles participent aussi à la régulation des populations de micro-organismes, en particulier de la mycorhizosphère (rhizosphère des racines mycorhizées) par la pression qu’ils exercent sur ces populations.

Un effet sur les biomasses végétales et racinaires

Une diminution des populations de collemboles dans un sol conduit à une diminution des biomasses végétales et racinaires, mais aussi du nombre de plantes présentes sur un site, particulièrement si elle s’accompagne d’une diminution concomitante des populations de lombrics et/ou d’enchytréides.

Un indice précis de la dégradation des sols

Enfin, les collemboles sont très sensibles aux polluants et au travail du sol (pratiques agricoles conventionnelles) à tel point qu’ils sont devenus un outil d’analyse des ingénieurs agronomes pour évaluer l’innocuité (la « non-nocivité ») ou la nocivité des intrants, avec une sensibilité supérieure aux méthodes classiques. Une norme ISO internationale a même été construite autour de Folsomia candida qui voit sa reproduction inhibée par certains polluants, comme certains métaux lourds.

 

 

Favoriser la présence des collemboles du sol

Hormis quelques espèces rares (comme Sminthurus viridis en Australie), les collemboles ne présentent pas de risques pour les cultures mais rendent de nombreux services à nos sols. Que faire alors pour favoriser leur présence ? Comme souvent, ils sont en effet bien plus nombreux et diversifiés dans un sol forestier que dans un sol cultivé ! C’est donc de ce type de sol (stables, peu travaillé, riche en humus et avec une humidité relativement constante) qu’il faut chercher à s’approcher. Pour cela, on peut :

  • couvrir son sol pour préserver l’ombre et l’humidité des premiers centimètres, où les collemboles sont les plus nombreux, tout en leur apportant une partie de leurs ressources alimentaires.
  • favoriser le développement des populations fongiques du sol en privilégiant une couverture riche en carbone (au rapport C/N élevé), comme les BRF par exemple, en accord avec l’état de son sol.
  • éviter au maximum le travail en surface et en profondeur du sol, qui risquerait de faire remonter à la surface des espèces non-adaptées à ce milieu et de détruire les habitats de la majorité des collemboles présents dans le sol.
  • proscrire l’utilisation de pesticides (de synthèse comme d’origine naturelle), qui ont un impact sur la vie du sol dans son ensemble, donc sur sa fertilité naturelle.
  • éviter l’utilisation de fertilisants azotés, même organiques, qui font disparaître les champignons et de fait, les collemboles, dont la présence dépend du cycle du carbone.

 

 

 

 

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PRUVOST G., Les Dossiers de Micro & Macro – Les Collemboles du sol [en ligne], Chez le Père Magraine, 26/11/2017, 05/05/2019 [consulté le XX/XX/XXXX], disponible sur : https://www.chezleperemagraine.com/blog/micro-macro-collemboles-du-sol/

Il vous suffit de remplacer « XX/XX/XXXX » par la date à laquelle vous avez consulté cet article 🙂

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2 Replies to “Les Dossiers de Micro & Macro – Les Collemboles du sol”

  1. Je découvre votre projet et constate avec plaisir que vous y consacrez un dossier dédié aux collemboles que je trouve très pédagogique et abordable. Ces petits arthropodes si peu connus et pourtant si essentiels dans nos écosystèmes méritent amplement qu’on s’intéresse à eux.
    A ce titre, je me permets de vous signaler mon site qui peut être complémentaire de votre publication, pour ceux qui auraient envie d’en savoir un peu plus sur ces minuscules créatures.
    https://collemboles.fr

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