Les Dossiers de Micro & Macro – Qu’est-ce que la permaculture ?

IMPORTANT : cet article ne représente pas l’opinion de son auteur ni de « Chez le Père Magraine »

La permaculture, c’est quoi ? Vaste sujet que cette question à laquelle Micro & Macro répondent !

1 – Micro-bio : Étymologie et définition de la permaculture

2 – Au Microscope : L’origine de la permaculture

3 – Macrorama : La permaculture, une science ?

3 – Bibliographie

4 – Pour citer ce document

 

 

Étymologie : la permaculture, c’est un mot-valise

C’est la contraction de “permanent agriculture” (“agriculture permanente”), un concept apparu en 1910. Le mot “permaculture” à proprement parler n’apparaît que plus tardivement, et est popularisé par le travail de Bill Mollison et de David Holmgren en 1978 avec le livre Permaculture One. Le concept sera plus tard précisé par le livre Introduction à la permaculture de Bill Mollison et devient également la contraction de “permanent culture” (“culture de la permanence”), ce qui permet l’élargissement du concept aux autres domaines que l’agriculture (habitat, technologies, enseignement, finance, gouvernance, relations humaines, santé).

Permaculture

 

Définition : la permaculture, c’est une méthodologie

La permaculture c’est une méthodologie de conception de systèmes autonomes et durables, fonctionnant en accord avec les écosystèmes dans lesquels ils se trouvent. Cette méthodologie s’inspire des fonctionnements naturels, des sciences et des savoirs anciens, dans le but de répondre aux besoins du monde vivant (incluant les besoins humains). Elle est en outre encadrée par 3 grands principes éthiques : le soin des humain.e.s, le soin de la terre (et du monde vivant), le partage équitable des ressources (rémunérations, espaces, surplus, savoirs et connaissances). Ainsi, la permaculture ne produit pas de « techniques universelles » : une technique qui fonctionne à un endroit peut être néfaste si elle est appliquée ailleurs ! Entre d’autres termes, à chaque site ses techniques adaptées !Permaculture

 

 

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L’origine de la permaculture

Bill Mollison est souvent considéré comme l’inventeur de la permaculture, mais, comme il l’écrit lui-même, il a surtout compilé et organisé des savoirs et des connaissances pré-existants sous ce qu’on appelle aujourd’hui la permaculture.

 

Un héritage ancestral

L’humilité de Mollison à propos de la permaculture n’est pas gratuite : ayant étudié les Aborigènes de Tasmanie, il défend l’existence d’une agriculture aborigène, de laquelle il s’est inspiré. En effet, fondamentalement différente de l’agriculture occidentale, elle est longtemps passée inaperçue pour les yeux des colons anglais : les Aborigènes étaient considérés comme des chasseurs-cueilleurs nomades dans les mythes fondateurs de l’Australie. Alors, en quoi les Aborigènes sont-ils une source de la permaculture ? Les tribus sont “simplement” parvenues à prospérer plusieurs milliers d’années (entre 15 000 et 20 000 ans), chacune installée sur un territoire équivalent à un jour de marche, sans jamais avoir besoin de conquérir des territoires supplémentaires : en d’autres termes, grâce à leur rapport particulier à la nature, elles ont développé une agriculture permanente, permettant leur maintien de façon indéfinie (donc de façon durable), et limitant les conflits. L’effet de lisière (ou effet de bordure) est un des mécanismes utilisés par cette agriculture et présenté comme principe par Bill Mollison, mais son apport ne saurait s’arrêter là, les pratiques développées sont légions !

Évidemment, les Aborigènes ne sont pas les seuls à avoir développé une agriculture permanente ou des pratiques s’en approchant : on peut notamment citer les cultures précolombiennes d’Amérique, où est apparu le jardin iroquois (autrement appelé “la technique des trois sœurs”).

 

L’héritage de précurseurs

Du côté des auteur.e.s, on note des contributions importantes précédant la permaculture, bien que marginales dans leur société à l’époque de leur publication :

  • en 1760, Pons Augustin Alletz, aborde la nécessité d’une agriculture relative aux conditions locales : c’est le cœur de la méthode permaculturelle, qui est l’adaptation aux écosystèmes.
  • en 1910, Cyril G. Hopkins et en 1929, Russell Smith, ont développé le concept d’agriculture permanente, permettant à la terre cultivée de conserver sa fertilité naturelle, aux époques où l’agriculture se tournait déjà vers la fertilisation chimique, destructrice de la biodiversité des sols.
  • en 1954, Percival Alfred Yeomans développe le concept de “Keyline Design” : en combinant observations hydrologiques et topologiques, sa méthode optimise la gestion de l’eau.
  • en 1975, Masanobu Fukuoka introduit l’agriculture naturelle, ou agriculture du non-agir, avec son livre La révolution d’un seul brin de paille : y sont développées des méthodes de non-travail et de couverture du sol, sans désherbage, fertilisants ou pesticides.

 

L’héritage scientifique

Ce qui différencie la permaculture d’une simple compilation de savoirs anciens, c’est l’utilisation (notamment) de connaissances scientifiques, sensées questionner et confronter ces savoirs : météorologie, géologie, pédologie, botanique, entomologie, mammalogie, écologie sont autant de sciences dont dépend la permaculture (la liste est non-exhaustive !). En effet, la compréhension des systèmes naturels requiert une connaissance approfondie dans ces différents domaines : sans cela, il ne serait pas possible d’établir pleinement le “portrait” d’un système que l’on cherche à observer ou à concevoir.

 

 

La Permaculture, une science ?

 

Attention cependant : la permaculture n’est pas une science. Selon leurs définitions respectives, démarche éthique et démarche scientifique s’opposent : alors que la démarche éthique s’appuie sur des énoncés prescriptifs et/ou normatifs (ici les principes éthiques qui « imposent » une conception du monde), la démarche scientifique se base uniquement sur des énoncés descriptifs (pour construire une image factuelle du monde). Ainsi, la permaculture est une méthodologie qui puise notamment ses savoirs dans les sciences, mais qui n’est pas une science en soi.

Le risque, à prétendre que la permaculture est une science (malgré les différences entre démarche éthique et démarche scientifique), c’est que celle-ci finisse par être accusée d’être une « pseudoscience », à savoir une discipline qui se prétend science mais qui ne suit pas la démarche scientifique.

 

 

  • Contributeurs de Wikipédia, Éthique [en ligne], Wikipédia, 17/02/2005, 18/05/2018 [consulté le 04/06/2018], disponible sur : https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89thique
  • Contributeurs de Wikipédia, Permaculture [en ligne], Wikipédia, 06/10/2003, 03/12/2017 [consulté le 12/12/2017], disponible sur : https://fr.wikipedia.org/wiki/Permaculture
  • MOLLISON B., Introduction à la permaculture, Passerelle Éco, 2012, 240 p.
  • MOLLISON B., HOLMGREN D., Permaculture 1, Éditions Debard, 1986, 181 p.
  • MOLLISON B., Permaculture 2, Éditions Équilibres, 1993, 192 p.
  • VERET G., Permaculture, créer un mode de vie durable : Comprendre les enjeux et concevoir des solutions, Fleurus, Octobre 2017, 130 p.

 

 

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BEN BELAÏD S., Les Dossiers de Micro & Macro – Qu’est-ce que la permaculture ? [en ligne], Chez le Père Magraine, 08/01/2018, 05/06/2018 [consulté le XX/XX/XXXX], disponible sur : https://chezleperemagraine.com/blog/micro-macro-permaculture/

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5 Replies to “Les Dossiers de Micro & Macro – Qu’est-ce que la permaculture ?”

  1. Le mot science est un polysème, recouvrant principalement trois acceptions :

    Savoir, connaissance de certaines choses qui servent à la conduite de la vie ou à celle des affaires.
    Ensemble des connaissances acquises par l’étude ou la pratique.
    Hiérarchisation, organisation et synthèse des connaissances au travers de principes généraux (théories, lois, etc.).

    wikipédia

    Cela dit je préfère en ce moment de parler de l’ingénierie de la Permaculture

    1. Bonjour !:)

      Effectivement, le relativisme permet de dévoyer le sens des mots. C’est le cas pour la science, mais on peut également prendre l’art pour exemple : on a tout à fait le droit de parler de « l’art de se curer le nez » comme on parle du « 7ème art ». Mais un tel relativisme fait perdre complètement le sens des mots : on sera d’accord pour dire qu’il est difficile de trouver un mot désignant correctement à la fois le fait de se curer le nez et le fait de réaliser un long métrage !

      Pour la science, c’est un peu le même principe : on peut faire semblant d’ignorer ses particularités fondamentales, notamment sa méthodologie qui va à l’encontre du dogmatisme, et prétendre que la mise en pratique d’un dogme soit une science. Mais c’est précisément ce qu’on appelle une démarche pseudo-scientifique. On peut citer pour exemple de pseudo-sciences la méthode Bates, la géomancie ou encore la géobiologie.

      Cette catégorisation peut paraître peu bienveillante, mais seulement si l’on oublie la volonté de tromper inhérente à ces démarches : rappelons ici qu’on parle de dogmes prétendant mériter la crédibilité scientifique – même eux reconnaissent donc le statut « à part » de la science, puisqu’ils cherchent à se l’approprier à peu de frais (en usant par exemple de relativisme) – sans jamais en atteindre le degré d’exigence.

      Il n’y a évidemment pas de monopole sur le terme « science », mais dès lors qu’un mouvement, qu’un dogme, qu’une idéologie – bref, qu’un discours constitué d’énoncés prescriptifs – prétend posséder des solutions sérieuses et se pose en science, il semble assez logique d’évaluer sa scientificité à l’aune de ses prétentions.

      Fort heureusement, cette posture pseudo-scientifique n’est pas répandue chez tou.te.s les permaculteur.trice.s : la plupart de celles et ceux que nous avons côtoyés reconnaissent et/ou revendiquent le primauté de l’éthique dans la permaculture, lui conférant une identité idéologique et non scientifique.

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